Ne manquez aucun article ou étude publiés ! Suivre nos articles sur Google News
Une nouvelle étude présentée lors d’une conférence de l’American Heart Association affirme que manger tous ses repas quotidiens en moins de 8 heures, au lieu des 12 à 16 heures habituelles, augmenterait de 91 % le risque de décès d’origine cardiovasculaire. Cette conclusion a de quoi surprendre les millions de personnes qui pratiquent le jeûne intermittent justement dans le but d’améliorer leur santé cardiométabolique. Alors, le jeûne intermittent est-il réellement dangereux pour le cœur ? Décryptage d’une étude aux nombreuses failles méthodologiques.
Une étude préliminaire non validée par les pairs
Première limite de taille : l’étude en question n’est pour l’instant qu’un résumé préliminaire, présenté lors d’une conférence. Elle n’a pas encore été publiée dans une revue scientifique ni passée par le filtre de la relecture par les pairs. Ce processus est pourtant essentiel pour valider la solidité des données et du raisonnement scientifique. Sans validation par des experts indépendants, difficile d’accorder un grand crédit à ces résultats.
Des données auto-rapportées sujettes à caution
Autre point faible majeur : les données de l’étude sont auto-rapportées par les participants via des questionnaires espacés sur plusieurs années leur demandant de se remémorer ce qu’ils ont mangé. Même l’auteur admet que cela repose sur la mémoire des sondés et peut donc manquer de précision. On sait à quel point il est difficile de se souvenir avec exactitude de ce qu’on a consommé la veille, alors sur plusieurs années… Ces données déclaratives sont donc à prendre avec de grosses pincettes.
L’absence de prise en compte des facteurs de confusion
Mais le plus gros problème de cette étude est sans doute qu’elle ne prend en compte aucun autre facteur que la fenêtre temporelle d’alimentation. Rien sur la qualité nutritionnelle des aliments consommés, ni sur des paramètres aussi importants que le sommeil, le stress, l’activité physique ou le tabagisme qui ont un impact majeur sur la santé cardiovasculaire.
Comment interpréter des résultats sans connaître ces éléments de contexte essentiels ? Imaginons que les personnes mangeant en moins de 8h soient majoritairement des gros fumeurs stressés et sédentaires se nourrissant mal. Leur sur-risque cardiovasculaire serait-il vraiment lié à leur fenêtre alimentaire réduite ou plutôt à leur hygiène de vie globalement délétère ? Impossible de le savoir avec les données fournies. Cette absence de prise en compte des facteurs de confusion invalide les conclusions de l’étude.
Une population d’étude qui ne pratiquait probablement pas le jeûne intermittent
Autre interrogation de taille : les données ont été collectées entre 2003 et 2018, soit bien avant que le jeûne intermittent ne devienne populaire. Même si certaines cultures le pratiquent depuis longtemps, ce n’est que vers la fin des années 2010 que le concept s’est démocratisé. Il est donc peu probable que les personnes sondées aient consciemment fait du jeûne intermittent.
Dès lors, si elles ne le faisaient pas volontairement, pourquoi mangeaient-elles sur une plage horaire réduite ? On peut imaginer qu’il s’agissait de personnes très occupées, trop prises par leur travail pour prendre le temps de manger, sautant le petit-déjeuner, carburant au café et à la cigarette, et se rabattant sur la malbouffe rapide par manque de temps. Bref, un profil et un mode de vie à risque cardiovasculaire qui n’a rien à voir avec le jeûne intermittent bien conduit. Encore une fois, en l’absence de données détaillées, difficile de tirer la moindre conclusion de cette étude.
Une récupération médiatique prématurée et biaisée
Ce qui est particulièrement dérangeant, c’est la façon dont cette étude préliminaire a été immédiatement reprise en choeur par l’American Heart Association puis par de nombreux médias grand public comme le Washington Post, le New York Times, Pourquoi Docteur, Liberation, futura-sciences et même le très suivi Hugo décrypte. Près de 6000 articles ont relayé ces résultats non vérifiés, rédigés par des journalistes qui n’ont pas l’expertise pour évaluer de façon critique ce type d’étude.
Le but semble davantage de faire du sensationnalisme en brandissant le spectre des dangers du jeûne intermittent que d’informer objectivement le public. Résultat : des millions de personnes qui fondent de grands espoirs dans cette approche pour améliorer leur santé se retrouvent inutilement inquiétées et ne savent plus quoi penser.
Un manque d’ancrage dans la physiologie et un timing suspect
Ce qui interpelle aussi, c’est l’empressement de l’American Heart Association à mettre en avant cette étude sans fondement physiologique. Rien dans la littérature scientifique actuelle ne permet d’expliquer pourquoi le jeûne intermittent augmenterait à ce point le risque cardiovasculaire. Au contraire, les preuves de ses bénéfices sur la santé cardiométabolique s’accumulent d’année en année.
Dans ce contexte, le timing de la publication de cette étude et sa reprise massive interrogent. Ne serait-ce pas une tentative de discréditer une approche qui, en permettant aux gens de prendre leur santé en main, menace les intérêts de le monde médical ? Après tout, si les gens vont mieux en changeant simplement leur mode de vie, cela fait moins de patients et moins de prescriptions pour un système qui dépend financièrement d’une maladie chronique. Sans verser dans la théorie du complot, il est important de garder en tête que derrière les études et les recommandations de santé se cachent souvent des enjeux politiques et financiers qui n’ont pas toujours à cœur l’intérêt des patients.
De nombreuses preuves des bienfaits cardiométaboliques du jeûne intermittent
Car contrairement à cette étude isolée et fragile méthodologiquement, il existe maintenant de solides preuves, issues d’essais cliniques bien menés, que le jeûne intermittent, combiné à une alimentation saine, améliore la plupart des marqueurs de maladies cardiométaboliques. Bien sûr, cela ne veut pas dire que cela marche à tous les coups pour tout le monde. Mais dans l’ensemble, pour une majorité de gens, c’est une approche très efficace pour perdre du poids, réduire la graisse viscérale et améliorer la sensibilité à l’insuline, autant de facteurs clés pour la santé cardiovasculaire.
Faire confiance à la science, mais surtout à soi
Alors que croire et que faire face à des études contradictoires ? La meilleure approche est de ne faire une confiance aveugle à personne, pas même aux plus grandes autorités de santé, mais de se forger sa propre compréhension en étudiant le fonctionnement du corps humain. En croisant les informations de sources fiables, en repérant les tendances convergentes, en comprenant la physiologie, on devient capable de faire le tri entre les études solides et celles qui ne le sont pas.
Mais le plus important reste de faire ses propres expériences, en testant les approches sur soi-même tout en surveillant les vrais marqueurs de risque cardiovasculaire que sont la glycémie, l’insulinémie, l’hémoglobine glyquée, les triglycérides, le tour de taille, la tension artérielle, le rapport HDL/LDL et la taille des particules de LDL. En mesurant ces paramètres avant et après avoir testé le jeûne intermittent pendant quelques mois, on saura avec certitude si cela nous convient ou non, bien mieux qu’en se fiant à une étude mal fichue.
Prendre sa santé en main plutôt que de la confier aux autorités
Car le fond du problème est qu’il existe un attachement viscéral au statu quo médical, qui a trop à perdre si les gens se mettent à utiliser des approches efficaces et peu coûteuses pour rester en bonne santé. Le réflexe est alors de s’accrocher aux vieilles croyances et de discréditer à tout prix ce qui menace ce système.
Mais si on regarde les faits, force est de constater que pour l’immense majorité des gens, manger de vrais aliments, riches en nutriments, dans une fenêtre temporelle réduite, est l’une des meilleures choses à faire pour sa santé globale et cardiovasculaire en particulier. Bien sûr, si d’aventure en testant cette approche pendant 3 mois vos marqueurs se dégradent, alors le jeûne intermittent n’est probablement pas pour vous. Mais les chances que cela arrive sont infimes comparées à la probabilité de voir votre santé s’améliorer.
Alors ne laissez pas des études mal conçues et des titres racoleurs vous détourner de ce qui marche. Faites confiance à la science, mais surtout à votre expérience. Votre corps est votre meilleur guide. En prenant votre santé en main, en comprenant comment fonctionne votre physiologie, en testant les approches par vous-même, vous constaterez vite que le jeûne intermittent, loin d’être dangereux, est l’un des plus puissants alliés de votre santé cardiovasculaire. Alors n’ayez pas peur d’expérimenter, votre cœur vous dira merci !