Ne manquez aucun article ou étude publiés ! Suivre nos articles sur Google News
S’entraîner plusieurs fois par jour présente à la fois des avantages et des inconvénients. D’une part, le fait de diviser votre entraînement en plusieurs petites séances peut vous permettre de mener à bien votre programme d’entraînement si vous n’avez pas assez de temps pour tout faire en une seule fois. D’autre part, vous pourrez être plus frais pour les exercices secondaires ou complémentaires si vous pouvez les effectuer séparément (au lieu d’être épuisé après avoir effectué vos exercices de base de la journée et de devoir continuer à faire des exercices auxiliaires). En revanche, faire plusieurs entraînements par jour (surtout si vous ne travaillez pas dans une salle de sport ou si vous n’avez pas d’appareil de musculation chez vous) peut être plus contraignant que de simplement faire tout votre entraînement en une seule séance.
Le but de l’étude que nous allons décrypter(1) était de comparer les résultats obtenus en effectuant la totalité d’un entraînement en une seule séance par rapport au fractionnement du même entraînement en trois séances par jour (triple split routine), avec appariement des volumes.
Décryptage de l’étude
Participants et méthodes
Participants
Les participants étaient 20 jeunes hommes d’une vingtaine d’années (22 ans ± 1 an) qui n’avaient aucune expérience antérieure en matière d’entraînement de musculation. Ils pratiquaient des sports de loisirs 3 à 4 fois par semaine et n’avaient pas de blessures musculo-squelettiques.
Test
La taille, la masse corporelle et la composition corporelle ont été évaluées avant et après l’entraînement le matin à jeun. La composition corporelle (pourcentage de graisse corporelle et de masse sans graisse) a été estimée à l’aide d’un impédancemètre bioélectrique. Comme cette technique n’est certainement pas la meilleure pour évaluer la composition corporelle, les chercheurs ont utilisé un modèle dont les résultats étaient fortement corrélés avec ceux du DXA(2).
La force a été évaluée en testant la 1RM au développé couché avant et après l’entraînement. Les performances anaérobiques du haut du corps ont été évaluées avant et après l’entraînement avec le test de Wingate du haut du corps, qui comprenait un “sprint” de 30 secondes sur un ergomètre pour les bras. La puissance maximale (la puissance la plus élevée observée sur une période de cinq secondes), la puissance moyenne et l’indice de fatigue (la baisse de puissance du début à la fin du test) ont été évalués pour mesurer les changements de performances anaérobies. Les taux de lactate sanguin ont aussi été mesurés parallèlement au test de Wingate, avec des échantillons de sang prélevés par piqûre au doigt directement avant le test, puis directement après le test, et enfin 3, 5, 15 et 30 minutes après le test.
Entraînement
L’entraînement s’est déroulé sur trois jours non consécutifs par semaine pendant 12 semaines. Les exercices consistaient en des élévations latérales pour les épaules, du tirage vertical devant pour le dos, du développé à la machine pour les épaules, des curls biceps, des extensions des triceps, des écartés à la machine pour les pectoraux, des extensions lombaires pour le dos et des crunchs pour les abdominaux. Les participants ont fait trois séries de chaque exercice chaque jour d’entraînement. Le programme d’entraînement a suivi une configuration linéaire périodisée.
Les semaines 1 à 4 impliquaient des charges de 50 à 55 % de 1RM pour des séries de 12 à 15 répétitions, puis des séries de 10 avec 65 % de 1RM pour les semaines 5 à 8, et des séries de 8 avec 75 % de 1RM pour les semaines 9 à 12.
Les participants ont été divisés en deux groupes. Un groupe a effectué tout son entraînement chaque jour en une seule séance (“SB” ; n=10), tandis qu’un groupe a divisé son entraînement en trois séances chaque jour d’entraînement (“TB” ; n=10).
Le groupe SB a fait les trois séries de chaque exercice avant de passer à l’exercice suivant. Ils se sont reposés 30 secondes entre les séries et 60 secondes entre les exercices. Toutes les séances d’entraînement pour le groupe des BS ont eu lieu à 17h. Le groupe des TB a fait une série de chaque exercice dans chaque séance d’entraînement, avec 30 secondes de repos entre les exercices. Les trois séances d’entraînement pour le groupe TB ont eu lieu à 8h, 17h et 21h.
Nutrition et activité physique
Les carnets alimentaires ont été recueillis avant le début de l’entraînement, à la 6ème semaine et à la 12ème semaine du programme d’entraînement. Des questions sur les activités physiques ont également été posées, et les participants ont reçu la consigne de maintenir leur activité physique habituelle et de s’abstenir de faire de la musculation en dehors du protocole de l’étude.
Résultats de l’étude
L’apport calorique moyen était semblable entre les groupes et a augmenté de façon significative au cours de l’étude pour les deux groupes (environ 300-400 kcal/jour), passant de ~2500 kcal/jour à ~2800-2900 kcal/jour.
Les deux groupes ont enregistré une augmentation significative de la masse maigre, sans différence significative entre les groupes. Le pourcentage de graisse corporelle a diminué de façon peu significative dans les deux groupes, sans aucune différence entre les groupes.
Les deux groupes ont augmenté de façon significative leur force au développé couché (+33 % et +37 % pour respectivement les groupes SB et TB), sans différence significative entre les groupes. Les augmentations de la puissance maximale lors du test de Wingate, de la puissance moyenne et de l’indice de fatigue étaient également similaires entre les groupes. Les taux de lactate sanguin étaient aussi similaires entre les groupes à tous les moments avant et après l’entraînement. Qui plus est, les taux de lactate sanguin n’ont pas changé avant et après l’entraînement dans aucun des groupes.
Finalement, les variations de la masse maigre ont été corrélées de façon significative avec les variations de 1RM au développé couché (r=0,80-0,81), les variations de la puissance maximale au test de Wingate (r=0,75-0,78) et les variations de la puissance moyenne au test de Wingate (r=0,72-0,78).
Mes commentaires et interprétations
Cette étude a présenté deux inconvénients méthodologiques importants :
- À moins qu’ils n’aient oublié de le mentionner, les participants n’ont pas vraiment été “formés” au développé couché.
- Les séances d’entraînement n’étaient pas incroyablement longues, et compte tenu des périodes de repos prévues et des combinaisons de charge/répétition utilisées, les séances n’étaient probablement pas non plus trop fatigantes.
Le premier inconvénient donne en fait une perspective intéressante à la littérature existante sur le sujet. Plus précisément, Häkkinen et al(3) ont constaté que chez des athlètes féminines, un entraînement unique par jour n’entraînait pas de gain significatif au niveau de l’hypertrophie ou de la force d’extension du genou, alors qu’un entraînement 2 fois par jour (double split routine) le permettait. Une étude similaire chez des hommes a donné des résultats similaires : aucun changement au niveau de la force d’extension du genou après trois semaines d’entraînement quotidien, mais une augmentation significative de la force d’extension du genou après trois semaines d’entraînement deux fois par jour, avec un volume et une intensité équivalents(4). Une étude de suivi menée par Hartman et al(5) a révélé que chez des haltérophiles masculins bien entraînés, un entraînement deux fois par jour entraînait une augmentation légèrement significative de la force isométrique pour l’extension du genou et de l’EMG maximal des quadriceps. Ces trois études de très courte durée (trois semaines par phase d’entraînement) ont fait appel à des athlètes expérimentés et ont eu recours à un exercice très simple pour les tests.
La présente étude a par contre été plus longue (12 semaines), a utilisé des participants non expérimentés et a eu recours à un exercice plus complexe pour les tests. Il est plausible que les études précédentes aient trouvé des avantages associés à un entraînement multiple par jour parce que les athlètes de ces études avaient besoin de stimuli plus fréquents pour améliorer leurs adaptations neurales. Pour soutenir cette hypothèse, les deux études ont constaté des corrélations significatives entre les changements de l’EMG des quadriceps et les changements de la force d’extension isométrique du genou. En revanche, dans cette étude, les personnes non expérimentées en musculation ont dû obtenir de grandes améliorations neurales simplement en débutant leur entraînement de musculation, et tout effet neuronal supplémentaire éventuel résultant d’un entraînement plus fréquent n’aurait pas affecté les résultats étant donné que les participants n’ont pas été habitués et entraînés pour tester leur force (avec le développé couché).
À la lumière des études précédentes sur le sujet, cette étude appuie l’idée que la prise de force supplémentaire obtenue grâce à la division des séances d’entraînement en plusieurs par jour serait probablement due à des adaptations neurales.
L’autre inconvénient de cette étude (des séances courtes qui n’étaient probablement pas incroyablement difficiles) limite malheureusement son utilité pour les pratiquants chevronnés. L’un des avantages escomptés de l’entraînement sur plusieurs séances par jour est qu’il permettrait d’augmenter le volume d’entraînement ou les charges d’entraînement : vous bénéficieriez d’un certain temps pour récupérer partiellement (réduisant les manifestations aiguës de fatigue) après votre première séance de la journée, et vous auriez donc plus d’énergie à consacrer à votre deuxième séance de la journée. Par exemple, si vous aviez juste besoin de faire 3 séries de 5 squats avec 75 % de 1RM, vous pourriez facilement faire cela en une seule séance. Cependant, si vous aviez 8 séries de 5 squats avec la même charge, suivies de 6 séries de soulevé de terre à un RPE (rate of perceived exertion, en français “niveau d’effort perçu”) de 8-9, vous pourriez ne pas être capable de boucler le tout en une seule session. Si vous le faisiez, l’exécution de certaines des dernières séries au soulevé de terre serait probablement très laborieuse. Cependant, si vous faisiez 4 séries de squats et 3 séries de soulevé de terre réparties en une séance du matin et une séance de l’après-midi, ou si vous faisiez les squats et les soulevés de terre en deux séances séparées, la charge totale d’entraînement serait probablement plus facile à gérer et la qualité de l’entraînement serait probablement meilleure.
En fin de compte, cela nous montre que le fait de diviser une séance d’entraînement en plusieurs séances est loin d’être révolutionnaire. Si c’est un entraînement que vous pouvez faire facilement en une seule séance, vous ne perdez rien en le divisant si cela est plus pratique pour vous, mais vous ne gagnerez probablement rien non plus. Toutefois, selon des études antérieures, il pourrait être avantageux de fractionner des séances d’entraînement très éprouvantes en plusieurs séances par jour. Qui plus est, s’il y a un avantage à diviser vos séances d’entraînement, cet avantage est probablement d’ordre neuronal, et donc davantage significatif pour les pratiquants confirmés (pour lesquels la vitesse des adaptations neurales a considérablement ralenti).
Ce qu’il faut retenir
Le fait de faire toute votre séance en une seule fois ou de la diviser en plusieurs sessions sur une journée dépend principalement de votre disponibilité et de l’aspect pratique.
Il peut être avantageux de diviser des séances d’entraînement très intenses en plusieurs parties dans la journée si vous avez le temps, mais il n’y aura probablement pas de grand avantage si vous parvenez à faire tout votre entraînement en une seule séance.
Autres questions sur l’entraînement
Sources éditoriales et fact-checking