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Je suis sûr que tout le monde a entendu dire un jour que les squats profonds et les demi-squats lourds pouvaient abîmer vos genoux. Chez les athlètes professionnels, il est beaucoup plus fréquent de considérer que les flexions de jambes complètes sont plus sûres, et que mettre plus lourd sur des demi-squats peuvent endommager les genoux.
L’idée que les demi-squats vous feront mal aux genoux vient généralement de :
- L’hypothèse selon laquelle des charges plus lourdes causeront plus de stress et d’usure au niveau des articulations.
- L’idée que le recrutement des ischio-jambiers sera plus faible, entraînant donc un risque plus élevé de lésion du ligament croisé antérieur (LCA).
Sans perdre de temps, on peut déjà sans problème balayer le risque de blessure du LCA (à moins d’avoir un LCA déjà endommagé ou affaibli), car un LCA bien portant est capable de résister à des forces bien supérieures à celles auxquelles il est exposé pendant un squat(1).
Cependant, le risque d’usure causée par des contraintes articulaires plus élevées est une possibilité bien réelle, qui constitue un enjeu important à long terme. Il vaut donc la peine de faire des recherches sur ce point.
Dans la présente étude que nous allons décrypter(2), les chercheurs du Department of Kinesiology de l’université d’État de Californie ont évalué les moments de la force les plus importants des extenseurs du genou chez des femmes squattant au-dessus, à la parallèle et en dessous de la parallèle.
Les deux questions de recherche étaient :
- La profondeur du squat affecte-t-elle les moments maximums d’extension du genou ?
- La charge soulevée affecte-t-elle les moments maximums d’extension du genou ?
Décryptage de l’étude
Participants et méthodes
Participantes
Les participantes étaient 19 femmes en bonne santé, actives sur le plan sportif, ayant une expérience au squat de 3,8 ± 2,6 ans. Elles n’avaient pas d’antécédents de blessures aux jambes, ne participaient pas à des compétitions de sports de force et étaient capables de s’accroupir complètement avec une bonne technique.
Méthodes
Les 1RM des participantes ont été évalués à trois profondeurs différentes : amplitude complète (ischio-jambiers au contact des mollets), parallèle (pli des hanches sous le haut des genoux) et au dessus la parallèle (un demi-squat).
Cette démarche avait pour but de s’assurer que les charges utilisées pour les épreuves de test étaient toutes aussi lourdes pour les participantes aux trois profondeurs. En effet, 85% de votre 1RM en position squat complet sera très léger si vous vous accroupissez par la suite par rapport à la position demi-squat.
Une semaine après ces évaluations de 1RM, les 19 femmes ont effectué la séance test. Celle-ci comprenait deux répétitions au squat avec neuf combinaisons différentes de profondeur et de charge, effectuées dans un ordre aléatoire.
Les paramètres étaient les suivants : squats complets à 0 %, 50 % et 85 % de 1RM, squats parallèles à 0 %, 50 % et 85 % de 1RM, et demi squats à 0 %, 50 % et 85 % de 1RM. Les athlètes pouvaient utiliser la technique la plus confortable, mais la largeur et la position des pieds étaient maintenues constantes pour chaque personne dans toutes les épreuves. Par ailleurs, chaque répétition a été exécutée avec une pause d’une seconde en bas de la flexion afin de minimiser l’effet rebond.
Les moments de force maximums de l’articulation du genou ont été calculés en utilisant la dynamique inverse(3) à partir des données fournies par des plaques de force et un système de caméra.
Les chercheurs se sont concentrés sur les moments de force maximums de l’articulation du genou, car on a constaté qu’ils augmentaient proportionnellement avec le stress articulaire fémoro-patellaire(4), lié aux douleurs et à la dégénérescence cartilagineuse fémoro-patellaire.
Résultats de l’étude
Comme on pouvait s’y attendre, plus la profondeur des squats était importante, moins les 1RM étaient élevés. Les participantes ont pu faire en moyenne un demi-squat à 72,37 kg, un squat à la parallèle à 63,13 kg et un squat complet à 58,85 kg.
Pendant les flexions de jambes sans charge, l’augmentation de la profondeur n’a pas eu d’incidence sur les moments articulaires du genou. Pendant les flexions de jambes avec 50 % de 1RM (spécifique à la profondeur), les moments maximums de l’articulation du genou étaient significativement plus élevés pendant les flexions complètes que pendant les flexions parallèles ou demi-flexions, malgré une charge absolue inférieure.
Pendant les flexions de jambes avec 85 % de 1RM (spécifique à la profondeur), les moments maximums de l’articulation du genou étaient significativement plus élevés pendant les flexions complètes que pendant les flexions parallèles, mais n’étaient pas significativement différents entre les flexions complètes et les demi-flexions de jambes.
Cependant, même si la différence n’était pas significative, les moments maximums de l’articulation du genou avaient tendance à être plus élevés avec des flexions complètes qu’avec des demi-flexions, avec une valeur p relativement faible (p = 0,064).
Mes commentaires et interprétations
Tout d’abord, je pense qu’il est utile d’expliquer pourquoi les moments de force maximums de l’articulation du genou sont un bon indicateur général des contraintes de compression qui s’exercent sur ce dernier.
Lorsqu’ils sont soumis à un moment articulaire externe au genou, les quadriceps doivent se contracter pour tendre la jambe. Ce faisant, ils appuient contre la rotule, qui exerce une pression contre le tibia et le fémur.
De plus, une contraction du quadriceps tire également le tibia vers le fémur, provoquant une force de cisaillement antérieure et une force de compression supplémentaire.
Comme mentionné précédemment, en supposant que vous avez des LCA bien portants, le cisaillement antérieur n’est pas un problème.
Cependant, les forces de compression peuvent user le cartilage derrière la rotule et à l’intérieur du genou au fil du temps ; ces forces de compression augmentent avec les moments de l’articulation du genou, car les moments plus importants de l’articulation du genou nécessitent des contractions plus fortes des quadriceps.
Pour en revenir à l’étude, je l’ai trouvé intéressante pour plusieurs raisons.
La première est qu’il s’agissait en fait d’une reproduction fidèle d’une étude réalisée en 2013 par Cotter et al(5) sur des hommes, et il est très rare de voir une telle similitude dans les résultats, même si en théorie la science est censée être reproductible.
La deuxième était que cette étude (et l’étude Cotter) contredisait le mythe lassant selon lequel le squat lourd au-dessus de la position parallèle est mauvais pour les genoux, et que le squat (un peu moins lourd) bien en dessous de la parallèle est la meilleure option pour les genoux.
En comparant cette étude à l’étude de Cotter, la seule différence majeure était que les moments maximums sur les articulations du genou à 85 % des 1RM étaient profondeur maximale > parallèle > au-dessus de la parallèle pour Cotter (graphique 3), alors que les squats au-dessus de la parallèle présentaient des moments articulaires du genou nominalement plus élevés que les squats parallèles dans cette étude.
Dans les deux études, les squats complets ont eu des moments de force plus importants au niveau de l’articulation du genou.
Concernant l’idée que des squats complets sont intrinsèquement meilleurs pour les genoux et que des demi-squats sont plus dangereux, je pense qu’elle est venue en réaction au principe dominant qui existait par le passé : squatter au-dessus de la parallèle est moins risqué, tandis que vos genoux vont littéralement exploser si vous squattez sous la parallèle.
Les gens ont soutenu que puisque vous pouvez charger plus lourd avec des demi-squats qu’avec des flexions complètes, cela imposera plus de stress sur vos genoux(6).
Finalement, cette étude et l’étude de Cotter ont montré que si l’on tient compte de l’augmentation des moments de force des articulations du genou lors des squats profonds, cela équivaut à une augmentation de la charge que vous pouvez supporter avec des demi-squats.
Que les choses soient claires : je ne dis pas que les gens devraient éviter les squats profonds. Je ne dis pas non plus que, puisque les demi-squats ne sont probablement pas aussi risqués que beaucoup de gens le croient, vous devriez commencer à faire des demi-squats.
Je suis surtout d’avis que les deux variantes sont probablement convenables pour la plupart des gens. Vous ne devriez pas vous sentir obligé d’éviter de squatter à une certaine profondeur parce que vous craignez pour la santé de vos genoux. Si vous squattez pour prendre du muscle, faites des squats profonds(7).
Si vous faites des squats pour le powerlifting, assurez-vous au moins de passer la parallèle. Et si vous êtes un athlète de haut niveau qui squatte pour améliorer votre vitesse de sprint ou votre hauteur de saut, c’est probablement une bonne idée de faire du squat au moins à la parallèle la plupart du temps, mais cela peut valoir le coup de travailler en demi-squat ou en quart de squat(8).
Bien que les tolérances individuelles varient, les genoux, lorsqu’ils sont en bonne santé, peuvent très bien supporter des charges lourdes au squat et à toute profondeur.
Ce qu’il faut retenir
Le mythe selon lequel les squats complets sont mauvais pour les genoux et le mythe selon lequel les demi-squats lourds sont mauvais pour les genoux sont encore très en vogue. Cependant, ces deux mythes méritent de disparaître. Squattez de la manière qui convient le mieux à votre corps et à vos objectifs. Quelle que soit la profondeur, vos genoux se porteront bien.
Autres questions sur l’entraînement
Sources éditoriales et fact-checking