Ne manquez aucun article ou étude publiés ! Suivre nos articles sur Google News
La plupart d’entre nous ont simplement besoin de nous entraîner lorsque notre emploi du temps le permet. Ce qui s’avère pratique peut donc ne pas être optimal.
Cela dit, si vous avez plus de souplesse dans vos horaires d’entraînement, cela vaut la peine de vous demander si vos progrès seraient influencés en fonction des heures auxquelles vous vous entraînez.
De même, si vous deviez faire un entraînement de musculation et un autre de cardio, et que votre agenda ne vous permette pas de les faire en deux séances distinctes à des jours différents, il y a tout intérêt de savoir si vos progrès en musculation seraient affectés par l’ordre ou vous effectuez ces deux activités.
Une étude récente, résumée dans les deux publications(1)(2) que nous allons décrypter, nous aide à faire la lumière sur ces questions.
Décryptage de l’étude
Participants et méthodes
Participants
72 personnes ont été recrutées parmi lesquelles 52 ont terminé l’étude en participant à au moins 90 % des séances d’entraînement. La plupart avaient entre la fin de la vingtaine et la fin de la trentaine (32,3±5,6 ans) et étaient décrits comme physiquement actifs, mais ne pratiquaient ni la musculation ni de cardio depuis au moins un an au moment du début de l’étude. Les chronotypes des participants ont également été évalués, et aucun d’entre eux n’avait des chronotypes extrêmes du matin ou du soir. Aucun ne travaillait de nuit ou ne prenait de médicaments qui pouvaient affecter son rythme circadien.
Ces personnes ont donc été divisées en quatre groupes.
- Groupe 1 (ASm, n=9) : entraînement entre 6 h 30 et 10 h 00 du matin. Entraînement aérobique avant l’entraînement de musculation.
- Groupe 2 (SAm, n=9) : entraînement le matin, en effectuant un entraînement de musculation avant de faire l’entraînement aérobique.
- Groupe 3 (ASe, n=12) : entraînement en fin de journée (entre 16 h 30 et 20 h 00). Entraînement aérobique avant l’entraînement de musculation.
- Groupe 4 (SAe ; n=12) : entraînement en fin de journée, avec un entraînement de musculation avant de faire l’entraînement aérobique.
Entraînement
Les entraînements ont été réalisés pendant 24 semaines, ce qui en fait une étude assez longue. Pendant les 12 premières semaines, les participants s’entraînaient deux fois par semaine. Ils se sont ensuite entraînés cinq fois toutes les deux semaines (c’est-à-dire une augmentation de 25 % de la fréquence) au cours des 12 dernières semaines de l’étude.
Entraînement de musculation
L’entraînement de musculation a suivi une approche linéaire périodisée, en utilisant deux cycles de 12 semaines.
- Les quatre premières semaines de chaque cycle reposaient sur un circuit-training axé sur l’endurance de force, avec des charges allant de 40 à 70 % de 1RM sur des séries de 10-20 répétitions.
- Les quatre semaines suivantes de chaque cycle consistaient en un entraînement typique axé sur l’hypertrophie, avec des charges de 70 à 85 % de 1RM sur des séries de 10 à 15 répétitions.
- Les quatre dernières semaines de chaque cycle consistaient en un travail de force, avec des charges allant de 75 à 95 % de 1RM sur des séries de 3 à 8 répétitions.
Les détails complets des paramètres de l’entraînement de musculation sont présentés dans le tableau 1. Les exercices utilisés dans le cadre de cette étude étaient la presse à cuisses, le leg extension et leg curl (car toutes les mesures de force et d’hypertrophie étaient effectuées sur le bas du corps). Toutefois, les participants ont également fait des exercices de curl pour les biceps, d’extension verticale à la poulie pour les triceps et des exercices de tirage vertical pour le dos, développé militaire pour les épaules, écartés couchés avec haltères pour les pectoraux, et des exercices d’extension pour les muscles de la colonne.
Entraînement aérobique
L’entraînement aérobique consistait en un entraînement de cardio de faible intensité (LISS) et un entraînement plus intensif avec intervalles (HIIT).
- Le cardio LISS impliquait de faire du vélo à 65-80 % de la fréquence cardiaque de réserve pendant 30 à 50 minutes.
- L’entraînement HIIT consistait à faire quatre cycles de vélo à 85-100 % de la fréquence cardiaque de réserve pendant quatre minutes, espacés de 4 minutes à 70 % de la fréquence cardiaque de réserve.
Pendant les 12 premières semaines d’entraînement, les participants ont effectué une séance de cardio LISS et une séance de cardio HIIT par semaine. Pour la deuxième période de 12 semaines, lorsque la fréquence d’entraînement a été augmentée, des séances de cardio ont été ajoutées, et chaque période de 2 semaines comportait deux séances de LISS et trois séances de HIIT.
Épreuves de test
Une session de rodage a précédé la première session de test afin que les participants soient à l’aise avec les exercices d’évaluation. Puisque tous les résultats ont été publiés sur deux études, l’ordre des tests n’est pas tout à fait clair, mais il est probable que les tests de force et les tests neuromusculaires(3) ont été effectués ensemble et que tous les tests d’endurance ont été faits conjointement sur des jours différents. Tous les tests ont été effectués avant le début de l’étude, puis au bout de 12 semaines d’entraînement, et après la 24e semaine d’entraînement. Toutes ces épreuves de performance ont été effectuées le matin et le soir à des jours différents. Le déroulement est illustré sur le graphique 1 :
Taux d’hormones et fluctuations pendant la journée
Les taux des hormones testostérone et de cortisol ont été évalués à partir de prises de sang à quatre moments différents de la journée.
Hypertrophie
La section transversale du muscle vaste externe a été estimée à la moitié de la longueur du fémur par échographie.
Force et performance neuromusculaire
La force a été évaluée en faisant 1RM à la presse à cuisse, et en mesurant la force maximale isométrique d’extension de la jambe (mesurée à un angle de 107 degrés). L’EMG a été enregistré pendant la demi-seconde coïncidant à la force maximale produite pendant l’extension de la jambe. Le pourcentage d’activation volontaire (% VA) a également été évalué. Le % VA indique principalement la quantité de force qu’une personne peut produire volontairement, par rapport à la quantité de force qu’elle peut produire lorsque son muscle est stimulé par une électrode qui impose une “vraie” contraction maximale. En d’autres termes, un % VA de 95 % vous indique que lorsqu’il est stimulé par une électrode, le muscle d’une personne peut produire environ 5 % de force en plus que ce que la personne serait capable de produire volontairement.
Condition physique aérobique
Ce paramètre a été évalué en mesurant le temps nécessaire pour atteindre l’épuisement sur un vélo à résistance variable. La puissance a commencé à 50W et a augmenté de 25W toutes les deux minutes. La fréquence de pédalage était maintenue à 70 tours par minute. Le test a été exécuté jusqu’à épuisement complet du participant ou lorsque la fréquence de la pédale ne pouvait être maintenue. La puissance maximale à la fin de ce test a également été calculée en fonction de la durée pendant laquelle le dernier palier de puissance a été maintenu(4).
Résultats de l’étude
Les taux d’hormones au repos n’ont pas changé de façon significative dans aucun des groupes étudiés. En réunissant les deux groupes du matin et les deux groupes du soir, les taux de testostérone au repos ont augmenté légèrement, mais significativement (p<0,05) entre le début et la fin de la 24e semaine. Le taux de cortisol du matin a également augmenté (encore une fois, légèrement, mais significativement) dans les groupes du matin et du soir. Il est probable qu’aucun de ces changements hormonaux ne soit physiologiquement significatif.
La force 1RM des jambes a augmenté dans tous les groupes du matin et du soir, avec des augmentations moyennes allant de 13,8-19,3 % le matin et de 17,5-23,6 % le soir. Dans les deux cas, l’augmentation la plus importante a été enregistrée dans le groupe SAe et la plus faible dans le groupe ASm, mais il n’y avait aucune différence statistiquement significative entre les groupes. Cependant, il y avait une taille d’effet moyenne en faveur du groupe SAe par rapport au groupe ASm (0,57 pour les mesures du soir et 0,61 pour les mesures du matin) pour la variation en pourcentage.
La force d’extension isométrique de la jambe a augmenté de façon significative le matin pour les groupes SA, mais pas pour les groupes AS. Cependant, les groupes SA ont connu des augmentations beaucoup plus importantes de la force maximale d’extension de la jambe en soirée par rapport aux groupes AS au cours des 12 et 24ème semaines. Fait intéressant, la majeure partie des progrès réalisés au cours de la période de 24 semaines était attribuable à des augmentations nettement plus importantes au cours des 12 premières semaines, les groupes AS et SA ayant enregistré des gains semblables et non significatifs au cours des semaines 13 à 24.
Les groupes SA et AS ont tous deux enregistré des augmentations significatives de l’EMG du muscle vaste externe le matin, sans différence significative entre les groupes. Cependant, seuls les groupes SA ont connu des augmentations significatives de l’EMG du vaste externe le soir, et la différence était significative entre les groupes SA et AS.
Le pourcentage de contraction volontaire n’a pas changé de façon significative dans aucun des groupes. Cependant, au niveau individuel, il y avait des corrélations significatives et modérées (r=0.46-0.63) entre les variations du % VA et de la force d’extension isométrique de la jambe, du % VA et de l’EMG, et de l’EMG et de la force d’extension isométrique pour certains groupes, à certains moments de la journée et pendant certaines périodes. Comme les corrélations étaient plutôt modestes et incohérentes, et qu’il n’y a pas de justification physiologique pour expliquer pourquoi elles apparaissaient à certains moments et pas à d’autres (et comme elles ne nous donnent aucune information pratique que nous pouvons vraiment appliquer), je ne m’y attarderai pas plus.
Au cours des 12 premières semaines, tous les groupes ont eu une hypertrophie du muscle vaste externe significative, sans différence significative entre les groupes. Cependant, seuls les groupes du soir ont connu des augmentations significatives au cours des semaines 13 à 24. La variation moyenne du vaste externe était près de 50 % plus importante dans les groupes du soir au cours de l’étude (12 % contre 17,75 %), associée à une taille d’effet moyenne (0,44).
Le temps avant épuisement et la puissance maximale ont eu tendance à augmenter davantage au cours des 24 semaines dans les groupes AS que dans les groupes SA (certaines différences étaient importantes, et d’autres non). En fin de compte, les deux groupes du matin ont obtenu des résultats assez similaires, tandis que le groupe ASe a eu tendance à obtenir des résultats considérablement meilleurs que le groupe SAe (avec quelques différences non négligeables p=0.06).
Mes commentaires et interprétations
Les nombreux résultats de ces études peuvent paraître écrasants : taux de testostérone et de cortisol pour quatre groupes à quatre moments différents de la journée, les chiffres avant, après l’entraînement, tant le matin que le soir, pour la presse à cuisse, la force maximale isométrique de la jambe, la valeur EMG et la force maximale en watt…
Si vous ajoutez les différentes façons de combiner les groupes pour les besoins de l’analyse, il y a probablement plus de 100 comparaisons distinctes entre les groupes dans ces études. Cela étant dit, je ne vais même pas tenter de les aborder toutes individuellement pour le bien de mes doigts, pour le bien de votre capacité d’attention, et simplement parce qu’au moins quelques-unes des différences relevées sont forcément faussement positives en raison du nombre de comparaisons possibles. Examinons plutôt les grandes tendances.
Le développement de la force ne semblait pas être spécifique aux heures d’entraînement dans la journée.
En d’autres termes, si vous vous entraînez le soir, vos augmentations de performance se répercuteront également sur le matin, et vice versa. Cette observation contraste cependant avec d’autres études qui montrent que les gains de force peuvent, dans une certaine mesure, être plus prononcés selon l’heure de la journée. Concrètement, la plupart des gens ont tendance à être naturellement plus forts l’après-midi et le soir, mais s’entraîner régulièrement le matin peut atténuer ces différences de sorte que les performances du matin se rapprochent davantage des performances du soir(5)(6)(7).
Ce point peut être important pour les powerlifters qui s’entraînent généralement le soir et qui craignent de ne pas être en mesure de faire une bonne performance lors d’une compétition en matinée. Devenir plus fort le soir vous rendra aussi plus fort le matin, mais cela ne vous fera pas de mal de faire quelques séances de squat le matin avant la compétition. Cela peut améliorer vos performances sur le plan physiologique et, en pratique, vous donnera une meilleure idée de la façon dont votre corps réagit en soulevant des charges lourdes le matin et vous aidera à déterminer le temps nécessaire pour vous échauffer avant votre premier essai. Beaucoup de personnes sont surprises de savoir combien de séries d’échauffement supplémentaires elles ont besoin pour se sentir bien pour leur squat à 9 heures du matin quand elles ont l’habitude de squatter à 17 heures.
La prise de force et les progrès sur le plan aérobique semblent être influencés par l’ordre dans lequel ils sont placés dans une séance d’entraînement, du moins dans une certaine mesure.
Ce résultat n’est pas très surprenant, car vous avez simplement plus d’énergie à consacrer au type d’entraînement que vous faites en premier dans une séance. Cette étude soutient donc la thèse de la spécificité : si vous voulez donner la priorité à l’amélioration d’une qualité physique donnée (que ce soit la force ou l’endurance), entraînez-la quand vous êtes frais.
Ceci dit, ces résultats contrastent avec ceux d’Eklund et al.(8), dans lesquels un groupe effectuant un entraînement de force avant un entraînement aérobie a gagné de manière non significative plus de force que le groupe effectuant un entraînement aérobic en premier (17 % contre 13 % ; pas assez de données pour calculer la taille d’effet entre les groupes) mais le groupe qui a fait les entraînements aérobiques en premier ne présentait aucun avantage en termes de puissance au cours du test à vélo.
Une autre série d’études similaires de Chtara et al.(9)(10) ont constaté que l’entraînement en endurance avant l’entraînement en force permettait des gains plus importants sur le plan aérobique que sur la force, mais que l’inverse donnait des différences minimes sur la prise de force.
Deux autres études sur le même sujet, l’une de Gravelle et Blessing(11) et l’autre de Schumann et al.(12), ont également constaté des différences négligeables en terme d’adaptations selon que les séances d’entraînement commençaient avec la force ou du cardio.
L’ensemble de la littérature suggère donc qu’il n’est peut-être pas important que vous fassiez d’abord un entraînement de musculation ou un entraînement aérobique pendant une séance, mais elle suggère aussi que commencer par ce que vous voulez améliorer le plus est une bonne approche : mieux vaut être prudent.
L’hypertrophie peut augmenter plus rapidement si vous vous entraînez le soir, mais cela peut prendre quelques mois avant que la différence se perçoive.
Au cours des trois premiers mois, les changements au niveau du muscle vaste externe ont été semblables entre les groupes du matin et du soir. Cependant, les groupes du soir ont enregistré une hypertrophie beaucoup plus importante au cours des trois mois suivants.
Cette observation concorde avec une étude de Sedliak et al.(13) dans laquelle un groupe qui s’est entraîné le soir pendant 20 semaines a augmenté le volume de ses quadriceps légèrement plus qu’un autre qui s’est entraîné le soir pendant 10 semaines, puis le matin pendant 10 semaines (3,5 % contre 2,7 %). Même si la différence n’était pas significative, la taille de l’effet du pourcentage d’augmentation entre les groupes était importante (d = 1,2), ce qui indique qu’il y avait probablement une différence que l’étude ne permettait tout simplement pas de faire ressortir correctement.
De plus, dans une autre étude de Scheett et al.(14), un groupe de jeunes hommes s’entraînant le soir a augmenté sa masse corporelle maigre de 3,21 %, alors qu’un groupe s’entraînant le matin ne l’avait augmenté que de 0,64 % (même si cette différence, une nouvelle fois, ne s’avérait pas significative).
En fin de compte, si vous combinez un entraînement de force et une activité aérobique, cette étude, combinée aux autres études existantes, indique que le moment de la journée où vous vous entraînez et faites votre entrainement de musculation + cardio peut avoir un impact, mais qui reste minime.
Toutefois, si vous essayez de maximiser la prise de force, un entraînement en soirée avec un travail de la force avant de faire votre cardio (si vous devez faire les deux dans la même séance) peut entraîner des progrès légèrement plus rapides, mais la différence ne vaut probablement pas la peine de réorganiser tout votre programme si vous ne participez pas à une compétition, surtout si elle est contraignante ou ne convient pas à votre préférence. En outre, il peut être utile d’essayer de faire quelques séances de squat tôt le matin avant une compétition, car les gains de force peuvent être, dans une certaine mesure, spécifiques au moment de la journée.
Pour finir, si vous vous entraînez pour maximiser la croissance musculaire, il peut y avoir un avantage significatif à vous entraîner en fin de journée. Ces résultats ont été les premiers dans la littérature à démontrer un impact aussi important, mais deux autres études avaient également constaté des différences minimes (probablement dues à la faible puissance statistique) en faveur des entraînements en fin de journée.
Ce qu’il faut retenir
- Si vous devez effectuer un entraînement de musculation et un entraînement de cardio dans une même séance, faites d’abord votre entraînement de musculation (si vous souhaitez privilégier vos performances en musculation).
- Les progrès en force peuvent être spécifiques au moment de la journée, il peut donc être bénéfique de faire quelques entraînements matinaux de squat avant une compétition, si celle-ci se déroule le matin.
- Si vous voulez maximiser la prise de muscle, vous ferez probablement mieux de vous entraîner en deuxième partie de la journée plutôt que le matin.
Autres questions sur l’entraînement
Sources éditoriales et fact-checking