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Le dioxyde de silicium, également appelé silice amorphe ou E551, est un additif alimentaire dans plus de 2600 produits alimentaires à travers le monde. La maladie cœliaque est une intolérance permanente au gluten qui provoque une inflammation chronique de l’intestin grêle. En France, elle touche près de 0,7 % de la population mais reste largement sous-diagnostiquée. Ses symptômes, comme les douleurs abdominales, la diarrhée ou la fatigue, peuvent grandement altérer la qualité de vie des patients.
Une récente étude(1) menée par l’INRAE montre que l’exposition orale chronique de souris au E551 favorise l’apparition d’une maladie ressemblant à la maladie cœliaque humaine. Ces résultats soulèvent des inquiétudes sur l’innocuité du E551, jusque-là considéré comme un additif inoffensif.
Utilisation du E551 dans l’industrie alimentaire
Le dioxyde de silicium de synthèse, ou E551, est autorisé dans l’Union Européenne en tant qu’additif alimentaire. Sa limite maximale d’incorporation varie de 1 à 15 g/kg selon les aliments.
De par ses propriétés de poudre très fine, peu soluble, chimiquement inerte et non toxique, le E551 est utilisé par l’industrie agro-alimentaire comme agent anti-agglomérant. On le retrouve notamment dans :
- Les comprimés effervescents et chewing-gum pour empêcher les ingrédients de coller pendant la fabrication ;
- Les poudres instantanées (soupes, purées, boissons), y compris les préparations à base de céréales pour bébés pour faciliter leur dissolution ;
- Le fromage en tranches ou râpé et les fromages fondus ;
- Le chocolat, le café soluble et les assaisonnements en poudre pour les rendre moins collants et empêcher la formation de grumeaux ;
- Les épices pour fluidifier l’écoulement dans les lignes de production.
Bien que les doses autorisées soient faibles, l’omniprésence du E551 dans notre alimentation fait que l’exposition journalière peut être importante. En Europe, les chercheurs estiment que la consommation de dioxyde de silicium atteint 124 mg par jour.
À ces sources alimentaires s’ajoute également une exposition par inhalation du fait de la présence de silice amorphe dans la poussière domestique. En effet, le E551 est aussi utilisé dans les peintures, les papiers, les plastiques ou les cosmétiques. On le retrouve par exemple dans certains moules à pâtisserie.
La maladie cœliaque
La maladie cœliaque, aussi appelée intolérance permanente au gluten, est une pathologie auto-immune déclenchée par l’ingestion de gluten chez les personnes génétiquement prédisposées.
Le gluten est un ensemble de protéines contenues dans certaines céréales telles que le blé, le seigle et l’orge. Chez les malades cœliaques, il provoque une réaction immunitaire conduisant à une inflammation chronique et à une destruction progressive des villosités de l’intestin grêle.
Cette atteinte de la muqueuse intestinale empêche l’absorption correcte des nutriments et se manifeste par :
- Des douleurs et ballonnements abdominaux ;
- De la diarrhée ou une constipation ;
- Des carences nutritionnelles (fer, calcium, vitamines…) ;
- Une perte de poids ;
- De la fatigue chronique.
La seule solution pour les personnes atteintes de la maladie cœliaque est de suivre un régime strict sans gluten pendant toute leur vie.
Lien entre le E551 et la maladie cœliaque
Publiée dans Environmental Health Perspectives, l’étude menée par l’INRAE met en évidence un lien entre l’additif E551 et le développement d’une maladie ressemblant à la maladie cœliaque humaine chez la souris.
Méthodologie de l’étude
Des souris génétiquement modifiées pour exprimer le gène HLA-DQ8 (impliqué dans la maladie cœliaque chez l’Homme) ont été nourries pendant 60 jours avec un régime contenant 20 % de gluten de blé et d’orge, et ont été exposés par voie orale au E551.
Principaux résultats
Les chercheurs ont observé que les animaux présentaient une tolérance orale plus faible aux protéines alimentaires et, en même temps, des niveaux plus élevés d’inflammation intestinale. Ils ont également découvert que l’exposition au E551 réduisait le nombre de cellules immunitaires intestinales responsables de la production de composés anti-inflammatoires. En utilisant des souris exprimant le gène de risque de la maladie coeliaque, les chercheurs ont ensuite découvert qu’une exposition quotidienne au E551 aggravait les niveaux des marqueurs d’inflammation associés à la maladie.
Ces effets indiquent que l’exposition chronique au E551 aggrave la sensibilité des souris au gluten et favorise le développement d’une réaction immunitaire intestinale similaire à la maladie cœliaque humaine.
Mécanismes proposés
Bien que des investigations supplémentaires soient nécessaires, deux hypothèses pourrait expliquer l’effet délétère du E551 :
- Le E551 pourrait altérer la couche protectrice de mucus intestinal et perturber les jonctions serrées entre les cellules épithéliales. Cela augmenterait la perméabilité intestinale et faciliterait le passage des antigènes du gluten vers le système immunitaire, conduisant à une inflammation chronique.
- Les nanoparticules de E551 pourraient interagir avec le système immunitaire intestinal et provoquer la sécrétion de cytokines pro-inflammatoires. Cela activerait les lymphocytes T auxiliaires de type Th1, impliqués dans les maladies auto-immunes comme la maladie cœliaque.
Ce qu’il faut retenir
Cette étude met clairement en évidence que l’additif alimentaire E551 peut exacerber une sensibilité au gluten et favoriser le développement d’une pathologie ressemblant à la maladie cœliaque.
Elle soulève des inquiétudes sur l’innocuité de cet additif largement utilisé dans l’industrie agro-alimentaire et auquel la population générale est quotidiennement exposée.
Des investigations complémentaires chez l’Homme sont nécessaires, mais par précaution, une réévaluation des doses journalières admissibles pour le E551 semble s’imposer. À plus long terme, il conviendrait même d’envisager de restreindre son utilisation dans notre alimentation ou de le remplacer par des alternatives non nanoparticulaires.
En attendant, les personnes à risque de maladie cœliaque ou déjà diagnostiquées devraient être informées de la présence de E551 dans les aliments transformés et éviter d’y être exposées.
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Sources éditoriales et fact-checking