Ne manquez aucun article ou étude publiés ! Suivre nos articles sur Google News
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie inflammatoire chronique du système nerveux central (cerveau et moelle épinière). Elle est causée par une attaque du système immunitaire contre la gaine de myéline qui entoure les fibres nerveuses. Cette attaque provoque une démyélinisation inflammatoire et à terme une dégénérescence axonale.
La SEP est la cause non traumatique la plus fréquente de handicap neurologique chez le jeune adulte. On estime qu’environ 2,5 millions de personnes sont atteintes de SEP dans le monde. En France, cette maladie auto-immune touche environ 110 000 patients.
La SEP se déclare le plus souvent entre 20 et 40 ans et affecte 3 femmes pour 1 homme. Son incidence annuelle est d’environ 5 nouveaux cas pour 100 000 habitants. Bien qu’elle ne soit pas directement mortelle, la SEP réduit l’espérance de vie de 5 à 10 ans en moyenne.
Symptômes
Les symptômes de la SEP sont extrêmement variables d’un patient à l’autre mais aussi pour un même patient au cours du temps. Ils dépendent de la localisation des lésions démyélinisantes dans le système nerveux central.
Symptômes moteurs
Les symptômes moteurs sont fréquents au cours de la SEP. Ils associent :
- Faiblesse musculaire ;
- Spasticité (hypertonie musculaire à l’origine de raideurs et de contractions involontaires) ;
- Troubles de la coordination et de l’équilibre (ataxie) ;
- Fatigue musculaire.
Ces symptômes entraînent des troubles de la marche, une maladresse des membres, des chutes fréquentes ou encore des troubles de la parole (dysarthrie) et de la déglutition.
Symptômes sensitifs
Il existe également des atteintes sensitives telles que :
- Fourmillements ;
- Engourdissements ;
- Douleurs neuropathiques (brûlures, décharges électriques).
Ces symptômes sont très invalidants, notamment les douleurs qui répondent mal aux traitements antalgiques classiques.
Symptômes visuels
La névrite optique rétrobulbaire est fréquente au cours de la SEP. Elle associe :
- Baisse de la vision ;
- Douleurs oculaires ;
- Altération de la perception des couleurs.
D’autres atteintes visuelles sont possibles : diplopie (vision double), nystagmus (mouvements involontaires des yeux).
Symptômes vésico-sphinctériens
On peut observer une hyperactivité vésicale à l’origine d’urgenturies, de fuites urinaires, voire de rétention aiguë d’urine. La constipation est également fréquente.
Symptômes cognitifs
Les troubles cognitifs concernent 40 à 60 % des patients. Ils associent :
- Troubles de l’attention et de la concentration ;
- Troubles mnésiques ;
- Fatigue intellectuelle ;
- Ralentissement idéomoteur.
Ces symptômes retentissent fortement sur la vie quotidienne et professionnelle.
Causes et facteurs de risque
Bien que la physiopathologie de la SEP ne soit pas totalement élucidée, il est admis que cette maladie résulte d’une interaction entre des facteurs génétiques et environnementaux aboutissant à une réaction auto-immune contre les gaines de myéline du système nerveux central.
Origine auto-immune
La SEP est considérée comme une maladie auto-immune médiée par les lymphocytes T autoréactifs (lymphocytes dirigés contre les constituants du soi). Sous l’influence de facteurs déclenchants, ces lymphocytes T périphériques activés traversent la barrière hémato-encéphalique et induisent une réaction inflammatoire au niveau du système nerveux central. Cette neuro-inflammation aboutit à la destruction de la myéline et à terme des axones.
Facteurs génétiques
Certains variants du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de classe II sont associés à un risque accru de développer une SEP, notamment HLA-DRB1*1501. D’autres gènes de susceptibilité immunitaire ont également été identifiés par des études d’association pangénomique (genome wide association study ou GWAS).
Cependant, le risque de transmission familiale reste faible, de l’ordre de 2 à 5 %.
Facteurs environnementaux
Infections
Le rôle de certaines infections virales comme facteurs déclenchants de la SEP est suspecté. Il s’agit notamment d’Epstein-Barr virus et cytomégalovirus. Le lien avec d’autres virus neurotropes est controversé.
Latitude et ensoleillement
L’incidence et la prévalence de la SEP sont plus élevées dans les pays situés loin de l’équateur. Ce gradient nord-sud pourrait s’expliquer par une carence en vitamine D liée à un moindre ensoleillement.
Carence en vitamine D
De nombreuses études observationnelles ont montré une association entre de faibles taux sanguins de vitamine D et un risque accru de SEP. Cette vitamine possède des propriétés immunomodulatrices et neuroprotectrices. Cependant, son rôle causal dans la physiopathologie de la SEP reste à démontrer.
Diagnostic
Le diagnostic de la SEP repose sur la mise en évidence de lésions inflammatoires disséminées dans l’espace (atteinte multifocale) et dans le temps (récurrence des poussées), après exclusion des diagnostics différentiels.
Plusieurs examens complémentaires sont utilisés, sans caractère obligatoire, pour appuyer le diagnostic.
Examens paracliniques
IRM cérébrale et médullaire
L’IRM est l’examen de référence pour objectiver les lésions démyélinisantes typiques de SEP :
- Lésions en hypersignal T2 et FLAIR, de taille, forme et localisation variables ;
- Lésions prenant différemment le contraste après injection de gadolinium ;
- Atrophie cérébrale à un stade avancé.
Ponction lombaire
La ponction lombaire permet de doser certaines protéines (IgG) et de rechercher des bandes oligoclonales témoignant d’une synthèse intrathécale d’immunoglobulines. Ces anomalies sont présentes chez 95 % des patients atteints de SEP.
Potentiels évoqués
L’étude des potentiels évoqués somesthésiques, moteurs, visuels ou cognitifs permet de mettre en évidence des signes électrophysiologiques de démyélinisation.
Critères diagnostiques
Les critères internationaux les plus utilisés sont les critères de McDonald (révisés en 2017). Ils reposent sur la démonstration de lésions disséminées dans l’espace (DIS) et dans le temps (DIT). Selon le contexte clinique, 1 ou 2 épisodes cliniques suffisent pour le diagnostic de SEP :
- DIS + DIT avec 2 poussées cliniques ;
- DIS + DIT + 1 poussée clinique avec anomalies paracliniques (IRM, liquide céphalo-rachidien).
Formes frontières
Certains tableaux intermédiaires entre SEP et autres pathologies neurologiques sont qualifiés de « formes frontières ». Il s’agit notamment du syndrome cliniquement isolé (CIS) et des syndromes radiologiquement isolés (RIS). Leur risque évolutif vers une SEP « certaine » est très variable, nécessitant une surveillance prolongée.
Diagnostics différentiels
De nombreuses affections inflammatoires ou infectieuses du système nerveux central peuvent mimer une SEP. Les principaux diagnostics différentiels sont :
- Maladies infectieuses : neuroborréliose, HTLV-1, neurosyphilis ;
- Maladies inflammatoires : neurosarcoïdose, maladie de Behçet ;
- Déficits vitaminiques : carence en vitamine B12 ;
- Affections vasculaires : vascularites du SNC ;
- Tumeurs : lymphome du SNC, gliomes de bas grade.
Évolution et pronostic
L’évolution de la SEP est marquée par la survenue de poussées entrecoupées de périodes de rémission plus ou moins complète. La fréquence et la sévérité des poussées sont très variables d’un individu à l’autre.
Formes de la maladie
On distingue classiquement plusieurs formes évolutives de la SEP :
SEP récurrente-rémittente (SEP-RR)
Il s’agit de la forme initiale dans 85 % des cas. Elle associe des poussées aiguës avec récupération partielle ou totale. Entre les poussées, la maladie ne progresse pas.
SEP secondairement progressive (SEP-SP)
Survient en moyenne 15 ans après le début de la SEP-RR. Elle associe une progression lente du handicap, avec ou sans poussées surajoutées. Environ 80 % des patients initialement RR évoluent vers cette forme.
SEP progressive primaire (SEP-PP)
D’emblée progressive, elle représente 15 % des cas. L’aggravation est continue dès le début, sans poussées clairement identifiées.
SEP progressive à poussées (SEP-PPP)
Surajout de poussées aiguës à une SEP progressive primaire ou secondairement progressive.
Poussées
Les poussées correspondent à l’apparition de nouveaux symptômes neurologiques ou à l’aggravation de symptômes préexistants, persistant au moins 24 heures, en l’absence de fièvre ou d’infection. Elles traduisent une inflammation locale avec démyélinisation aiguë.
La durée d’une poussée est variable, de quelques jours à quelques mois. Leur fréquence est également très variable d’un patient à l’autre, de moins d’une par an à plusieurs par mois dans les formes agressives.
Rémissions
Les rémissions sont définies par une diminution ou disparition des symptômes survenus lors la poussée précédente. La récupération peut être complète ou partielle.
La qualité de la rémission dépend de la localisation et de l’étendue des lésions axonales. La réversibilité est d’autant plus limitée que l’atteinte tissulaire est importante.
Progression du handicap
L’accumulation de séquelles liées aux poussées et l’aggravation progressive conduisent à terme à un handicap physique et cognitif de sévérité variable. L’échelle EDSS (Expanded Disability Status Scale) est utilisée pour évaluer le degré de handicap moteur.
Facteurs pronostiques
Certains paramètres cliniques et IRM sont corrélés au pronostic de la maladie :
Facteurs cliniques
- Sexe féminin ;
- Age de début précoce (< 30 ans) ;
- Délai court entre la 1ère et la 2e poussée ;
- Nombre élevé de poussées la 1ère année ;
- Handicap sévère atteint précocement.
Facteurs IRM
- Charge lésionnelle T2 élevée ;
- Lésions prenant massivement le contraste ;
- Atrophie cérébrale et médullaire précoce.
Traitements
Bien qu’incurable à l’heure actuelle, la prise en charge thérapeutique de la SEP a considérablement progressé ces 20 dernières années, permettant de stabiliser, voire d’améliorer le pronostic fonctionnel.
Traitements de fond
Ils visent à modifier l’évolution de la maladie en diminuant la fréquence et la sévérité des poussées et en ralentissant la progression du handicap.
On distingue principalement :
Immunomodulateurs
- Interféron bêta ;
- Acétate de glatiramère ;
- Tériflunomide ;
- Diméthylfumarate.
Immunosuppresseurs
- Mitoxantrone ;
- Cyclophosphamide ;
- Azathioprine ;
- Méthotrexate ;
- Natalizumab.
Anticorps monoclonaux de 2e génération
- Alemtuzumab ;
- Ocrélizumab ;
- Ofatumumab.
Le choix du traitement de fond repose sur une décision partagée entre le patient et le neurologue après analyse du rapport bénéfice/risque individuel.
Traitements symptomatiques
Ils ont pour but de soulager les différents symptômes gênants au quotidien et d’améliorer la qualité de vie.
Spasticité : Baclofène, tizanidine, toxine botulique ;
Douleurs neuropathiques : Antiépileptiques, antidépresseurs, cannabis thérapeutique ;
Fatigue : Amantadine, modafinil, vitamine D ;
Troubles vésico-sphinctériens : Auto-sondages, anticholinergiques, alphabloquants ;
Troubles cognitifs : Réhabilitation cognitive, stimulation cérébrale.
Rééducation et réadaptation
La prise en charge paramédicale vise à prévenir et limiter les conséquences fonctionnelles du handicap moteur et cognitif. Elle repose sur :
- Kinésithérapie et ergothérapie ;
- Orthophonie en cas de troubles de la déglutition ou du langage ;
- Psychomotricité pour les troubles de l’équilibre et de la coordination ;
- Aménagement du domicile et du poste de travail.
L’activité physique adaptée contribue également à lutter contre la fatigue, la spasticité musculaire et les troubles de l’humeur.
Recherches récentes
De nombreuses pistes sont actuellement explorées dans l’espoir de mieux comprendre la physiopathologie de la SEP et de développer des traitements plus efficaces voire curatifs.
Découvertes en immunologie
L’implication de nouvelles populations lymphocytaires (Th17, Th9) et le rôle des lymphocytes B autoréactifs sont de mieux en mieux caractérisés, ouvrant la voie à de nouvelles cibles thérapeutiques.
Avancées en génétique
L’analyse du microbiote intestinal et de l’exposome (ensemble des facteurs environnementaux) chez les patients atteints de SEP permet d’affiner la compréhension des interactions gène-environnement.
Progrès en imagerie
Les techniques d’IRM ultra-haute résolution et de spectroscopie apportent de nouveaux biomarqueurs pronostiques de la maladie.
Pistes thérapeutiques
Différentes approches font l’objet d’essais cliniques :
- Immunothérapies ciblées ;
- Thérapie cellulaire par lymphocytes T ou cellules souches ;
- Molécules promouvant la remyélinisation et la neuroprotection.
Vos questions fréquemment posées
La sclérose en plaques est-elle contagieuse ?
Non, la sclérose en plaques n’est pas une maladie contagieuse. Elle n’est pas transmissible d’une personne à l’autre par contact direct ou par voie aérienne. Il s’agit d’une maladie auto-immune qui n’est pas infectieuse.
Quels sont les liens entre la SEP et la grossesse ?
Durant la grossesse, on observe une diminution de la fréquence des poussées, notamment au 3e trimestre. Cependant, le risque de poussée augmente dans les 3 mois suivant l’accouchement. Bien que plusieurs grossesses successives semblent ralentir l’évolution à long terme de la maladie, leur impact protecteur est encore discuté.
La sclérose en plaques empêche-t-elle d’avoir des enfants ?
Non, la sclérose en plaques n’altère généralement pas la fertilité. De plus, les grossesses sont le plus souvent bien tolérées chez les femmes atteintes de SEP et ne comportent pas plus de risques de complications que dans la population générale.
Quels sports sont recommandés aux patients SEP ?
Les activités d’endurance à intensité modérée sont bénéfiques pour les patients SEP : marche nordique, natation, vélo, yoga… Elles améliorent l’endurance, la force musculaire, l’équilibre et la qualité de vie, sans majorer la fatigue.
Quel est le rôle de l’alimentation dans la SEP ?
Il n’y a pas de régime alimentaire spécifique recommandé aux patients SEP. Cependant, certains nutriments comme la vitamine D ou les acides gras oméga 3 pourraient avoir un effet protecteur. A contrario, l’obésité constituerait un facteur aggravant.
La sclérose en plaques est-elle une maladie mortelle ?
Bien que ne réduisant pas directement l’espérance de vie, la SEP accroît modérément la mortalité par rapport à la population générale, en raison principalement de complications infectieuses et respiratoires. Avec une prise en charge adaptée, l’espérance de vie des patients SEP tend cependant à se rapprocher de celle de la population générale.
Le mot de la fin
Malgré les progrès récents, la sclérose en plaques reste une maladie aux conséquences lourdes sur le plan personnel, professionnel et socio-économique. L’amélioration de la qualité de vie et le maintien en emploi des patients constituent donc un enjeu de santé publique majeur.
Les avancées scientifiques récentes, notamment en génétique et immunologie, ouvrent cependant des perspectives prometteuses. La mise au point de biomarqueurs diagnostiques et pronostiques plus fiables ainsi que le développement de traitements curatifs et neuroprotecteurs représentent un espoir réaliste pour les patients à court ou moyen terme.