Et si la solution pour prévenir la démence se trouvait déjà dans nos pharmacies ?
C’est l’histoire d’un médicament tellement banal qu’on en oublie presque l’existence. Un comprimé avalé chaque matin par des millions de personnes à travers le monde. Son nom : metformine. Son job officiel : réguler le diabète de type 2. Mais derrière cette mission, la science vient peut-être de lui découvrir un super-pouvoir inattendu. Prêt à reconsidérer ta vision du médicament du quotidien ?
Quand la science bouscule les idées reçues
Les résultats sont tombés début août 2025, publiés dans la revue Diabetes, Obesity and Metabolism(1). Une équipe internationale, menée par des chercheurs de la Taipei Medical University, a mené l’une des plus vastes études jamais réalisées sur le sujet : plus de 450 000 adultes suivis sur dix ans, tous avec un point commun — un excès de poids ou une obésité. L’objectif ? Comprendre si la metformine, ce médicament prescrit depuis des décennies, peut faire reculer la menace de la démence, ce mal insidieux qui effraie tous les âges.
Leur méthodologie est à la hauteur de l’enjeu : chaque patient utilisateur de metformine a été comparé à un “jumeau statistique” ne prenant pas ce traitement, grâce à une technique pointue appelée « propensity score matching ». Ensuite, les chercheurs ont suivi l’évolution de ces deux groupes pendant dix ans. Résultat : les utilisateurs de metformine présentaient un risque de démence diminué de 8 à 12% selon leur catégorie d’IMC, et surtout, un risque de décès toutes causes confondues réduit de 26 à 28%.
La pilule qui défie le temps
On pourrait s’arrêter là. Mais ce qui fascine dans cette étude, c’est la constance de l’effet protecteur de la metformine, quel que soit le degré d’obésité. « Le bénéfice est observé de l’IMC modérément élevé jusqu’à des niveaux d’obésité sévère », souligne l’étude (Lin et al., 2025). Un peu comme si ce médicament, initialement conçu pour rééquilibrer le sucre dans le sang, agissait en coulisses pour préserver nos circuits neuronaux.
On pense à la metformine comme à une sentinelle silencieuse, discrète mais redoutablement efficace, qui veille sur le cerveau, même quand le corps s’alourdit.
Pourquoi c’est révolutionnaire ?
Dans un monde où la démence fait trembler chaque génération et où l’espérance de vie augmente, la perspective d’un médicament accessible, déjà éprouvé, qui pourrait réduire le risque de perdre la mémoire, a de quoi interpeller. Ce n’est pas une promesse de jeunesse éternelle, mais c’est un espoir concret : celui d’ajouter des années de vie… et de vie avec sa tête.
La metformine n’est pas un produit miracle. Les chercheurs le rappellent : « D’autres études sont nécessaires pour comprendre les mécanismes en jeu », précise Chiehfeng Chen, MD, PhD, MPH, co-auteur principal (publié dans Diabetes, Obesity and Metabolism, 2025). Mais cette immense étude, réalisée sur des dizaines de milliers de patients à travers le globe et sur une décennie entière, ne peut pas être ignorée. Elle s’appuie sur des données massives, issues de dossiers médicaux réels, loin des laboratoires aseptisés. Un parfum de “vraie vie” qui donne du poids aux résultats.
Un enjeu de société, un enjeu de quotidien
À l’échelle individuelle, c’est une information qui pourrait bien changer la donne pour toutes les personnes en surpoids ou obésité, déjà familières de la metformine. Mais plus largement, c’est une piste de réflexion pour les politiques de santé publique, les médecins généralistes et tous ceux qui s’inquiètent de l’explosion des cas de démence au fil des décennies.
Cette découverte ne révolutionnera pas la routine du matin du jour au lendemain. Mais elle invite à regarder autrement un médicament “de fond” : et si prévenir la démence, ce n’était pas forcément compliqué, technologique ou inaccessible ? Parfois, la solution se cache dans la simplicité d’un geste quotidien.
Le cerveau, c’est notre bien le plus précieux. Si une pilule, déjà connue et largement disponible, peut contribuer à le protéger, pourquoi ne pas s’y intéresser de plus près ?
Voilà une question qui mérite d’être posée. Et qui, peut-être, pourrait transformer le futur des générations à venir.
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Sources éditoriales et fact-checking