Une déchirure musculaire, également appelée claquage ou élongation, est une blessure courante chez les sportifs. Elle survient lorsqu’un muscle est étiré au-delà de ses capacités, provoquant des dégâts au niveau des fibres musculaires.
D’après une étude menée aux États-Unis, près de 30 % des blessures liées au sport concernent les muscles(1). Les déchirures musculaires représentent environ 10 à 55 % de toutes les blessures chez les athlètes, avec une prévalence plus élevée dans certains sports comme le football, le rugby ou le basketball.
Si elle n’est pas traitée correctement, une déchirure musculaire peut entraîner des complications à long terme. Elle augmente le risque de récidive et de douleurs chroniques. Une cicatrisation incomplète peut également provoquer une perte de force et de flexibilité du muscle.
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Causes
Les déchirures musculaires surviennent lorsqu’un muscle est étiré au-delà de ses limites physiologiques, provoquant la rupture partielle ou totale des fibres musculaires. Plusieurs facteurs entrent généralement en jeu dans la survenue de ces lésions traumatiques fréquentes chez les sportifs.
Surmenage et fatigue musculaire
Un muscle fatigué devient moins élastique et résistant. Lors d’un effort intense, il est alors plus susceptible de se déchirer sous l’action des forces de tension et de cisaillement. Un manque de temps dédié à la récupération musculaire est souvent en cause. Un surentraînement avec enchaînement rapproché de séances éprouvantes ne permet pas l’indispensable régénération tissulaire et la reconstitution optimale des réserves énergétiques intracellulaires. Ces muscles sursollicités, insuffisamment revascularisés et carencés en nutriments, s’avèrent fragilisés face aux contraintes mécaniques et aux lésions.
Mauvaise utilisation ou surutilisation des muscles
Certains gestes sportifs intensément répétés mobilisent de façon excessive un même ensemble musculaire. Une technique de mouvement inadéquate, avec mauvais placement articulaire, engendre des tensions internes néfastes. La dégradation microtraumatique progressive des fibres musculaires les rend ainsi vulnérables aux déchirures. Par ailleurs, un déséquilibre musculaire avec dominance d’un groupe sur son antagoniste entraîne des contraintes asymétriques délétères. Une hypertrophie exagérée génère également des zones de fragilité au sein du muscle.
Mouvements brusques et intenses
Les muscles ont des capacités d’étirement dont le dépassement entraîne des ruptures fibrillaires. Lors d’actions explosives, comme un sprint, un changement soudain de direction ou un saut, le caractère soudain de la mise en tension intense du muscle le soumet brutalement à un allongement supérieur à son seuil d’extensibilité physiologique. Ses limites élastiques sont alors dépassées, causant la déchirure soudaine de tout ou partie de ses fibres constitutives.
Manque d’échauffement et d’étirements
Des muscles froids, dont la température n’a pas été augmentée par un échauffement adéquat, sont plus rigides et moins élastiques. Leurs capacités d’allongement se trouvent réduites et les exposent davantage aux ruptures lors de leur mise en action. De même, un défaut d’assouplissement musculaire par des mouvements d’étirement préalables nuit à l’extensibilité tissulaire et prédispose aux lésions. Ce manque de préparation physique avant un effort intense majore donc significativement les risques de déchirure musculaire.
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Symptômes
Douleur ou sensibilité
La manifestation la plus évidente d’une déchirure musculaire est l’apparition soudaine d’une douleur vive au niveau du muscle lésé, survenant généralement au moment même de la blessure. Cette symptomatologie douloureuse aiguë peut varier en intensité, allant d’une gêne modérée à une souffrance extrême empêchant tout mouvement de la zone atteinte. Elle est causée par l’étirement brutal des fibres musculaires ayant entraîné leur déchirure partielle ou totale.
Après le choc initial, la zone douloureuse reste le siège d’une sensibilité anormale, avec irradiation dans les territoires musculaires et nerveux adjacents. Certains mouvements sollicitant le muscle lésé provoquent une recrudescence de la symptomatologie algique. L’inflammation liée à la rupture des fibres musculaires maintient également une stimulation nociceptive responsable de la persistance de la douleur dans les jours ou semaines suivant la blessure.
Rougeur ou ecchymoses
L’atteinte traumatique du muscle s’accompagne fréquemment d’une extravasation de globules rouges au niveau des vaisseaux sanguins déchirés par le processus lésionnel. Ce saignement interne circonscrit dans l’espace musculaire se manifeste par une rougeur et un aspect ecchymotique de la peau sus-jacente.
Cet hématome intramusculaire peut diffuser plus largement dans les jours suivants la blessure, s’étendant à distance par gravitation le long des fascia et aponévroses. Sa résorption progressive entraîne une évolution chromatique variée, avec des ecchymoses violacées puis verdâtres témoignant de la guérison tissulaire en cours.
Limitation des mouvements
Consécutivement au traumatisme musculaire, une contracture réflexe s’installe rapidement au niveau du muscle lésé mais aussi dans les territoires myotendineux adjacents. Cette crispation musculaire involontaire entrave la mobilité normale de la région atteinte.
Les mouvements de l’articulation mise en jeu sont limités de façon plus ou moins importante selon l’étendue des dégâts tissulaires. Une raideur accentuée à la mobilisation passive confirme le caractère aigu de la pathologie en cause. Cette ankylose musculaire protectrice peut perdurer pendant plusieurs semaines, nécessitant la mise en route précoce d’une rééducation pour lutter contre l’enraidissement cicatriciel.
Spasmes musculaires
Outre la contracture réflexe responsable de la restriction des mouvements, des contractions musculaires involontaires et douloureuses appelées spasmes sont fréquemment observées au niveau de la zone lésée ou des territoires proches. Ces crispations brutales et transitoires surviennent parfois au repos et sont majorées par certains mouvements ou étirements.
Ces spasmes musculaires traduisent l’hyperexcitabilité des fibres lésées mais aussi des motoneurones alpha dont l’influx nerveux est facilité par les phénomènes inflammatoires locaux. Ils contribuent à entretenir la douleur et nécessitent parfois l’utilisation de médicaments myorelaxants pour être contrôlés.
Gonflement
L’inflammation aiguë liée à la souffrance musculaire entraîne rapidement une réaction œdémateuse au niveau de la zone lésée. Cet épanchement de liquide interstitiel provoque un gonflement localisé, parfois très important, avec aspect tendu et brillant des téguments.
Cet œdème inflammatoire est lié à une augmentation de la perméabilité vasculaire et une extravasation de protéines plasmatiques suite aux dommages cellulaires. La palpation retrouve une tuméfaction molle et indolore, avec parfois un aspect fluctuant traduisant l’importance de l’épanchement intramusculaire.
L’importance du gonflement est un marqueur de la gravité de la souffrance musculaire. Sa résorption progressive lors de la phase de cicatrisation permet d’apprécier l’évolution de la pathologie traumatique vers la guérison tissulaire.
Faiblesse musculaire
Consécutivement à la rupture d’un certain nombre de ses fibres, le muscle lésé voit sa capacité de contraction diminuée de façon parfois très importante. Cette amyotrophie traumatique se manifeste par une faiblesse à la palpation et lors de la mise en jeu isolée du muscle endommagé.
Cette faiblesse musculaire est d’autant plus marquée que l’atteinte structurale est étendue. La diminution de force peut rendre impossible la réalisation du mouvement normalement induit par la contraction du muscle blessé. Son importance est corrélée à la gravité de la déchirure et au nombre de fibres rompues.
La récupération d’une trophicité normale nécessite le développement d’un tissu cicatriciel vascularisé et innervé, permettant la reconstitution d’un muscle fonctionnel. La durée de cette régénération conditionne la cinétique du retour à une force musculaire identique à celle précédant la blessure.
Muscles les plus touchés
Certains groupes musculaires sont plus exposés que d’autres aux déchirures :
- Dos : les muscles paravertébraux, sollicités dans de nombreux mouvements du tronc, sont sujets aux contractures et déchirures, notamment au niveau des lombaires.
- Cuisses : les ischio-jambiers (ischios, biceps fémoral et demi-tendineux) sont très vulnérables en raison de leur rôle dans la flexion du genou et l’extension de la hanche.
- Épaules : les rotateurs de l’épaule, particulièrement le sus-épineux, sont fréquemment touchés chez les sportifs pratiquant des gestes répétitifs au-dessus de la tête.
- Mollets : le muscle jumeau interne est le plus exposé aux déchirures au niveau des membres inférieurs, en lien avec sa fonction de flexion plantaire.
Degrés de gravité
On distingue trois niveaux de gravité des lésions musculaires :
- Élongation musculaire (Grade 1) : distension modérée des fibres avec micro-déchirures, sans rupture complète. C’est le degré le plus bénin.
- Déchirure partielle (Grade 2) : rupture d’une partie des fibres musculaires, de gravité intermédiaire.
- Déchirure complète (Grade 3) : sectionnement total du muscle. C’est la forme la plus grave, nécessitant souvent une intervention chirurgicale.
Le degré de gravité conditionne les traitements et la durée de rééducation nécessaire avant un retour complet à l’activité sportive.
Diagnostic
Le diagnostic d’une déchirure musculaire repose sur plusieurs éléments, permettant de confirmer la lésion et d’en évaluer précisément le siège et la gravité.
Examen clinique
L’interrogatoire et l’examen physique par le médecin sont primordiaux. Les circonstances de survenue de la douleur, son siège et son irradiation orientent le diagnostic. L’inspection de la zone douloureuse peut mettre en évidence un hématome, un gonflement ou une déformation.
La palpation recherche un point douloureux précis, une rétraction ou au contraire une solution de continuité du muscle. Des tests de contraction musculaire contre résistance permettent de tester sélectivement chaque muscle et de provoquer une douleur à l’endroit lésé.
Cet examen clinique permet déjà une approche topographique et sémiologique précise de la lésion musculaire suspectée.
Imagerie médicale
Des examens d’imagerie complémentaires affinent le diagnostic lésionnel et évaluent son étendue.
L’échographie musculaire est l’examen de première intention. Réalisée par un praticien entraîné, elle analyse finement l’architecture des fibres musculaires et tendineuses. Elle met en évidence d’éventuelles ruptures fibreuses, hématomes ou zones de désorganisation tissulaire.
L’IRM musculaire n’est indiquée qu’en deuxième intention si le diagnostic reste imprécis. Elle donne une cartographie extrêmement détaillée des lésions, mais son coût et ses délais d’accès sont plus importants.
Traitements
La phase initiale de traitement vise à limiter l’inflammation, soulager la douleur et favoriser la cicatrisation :
- Repos : éviter toute sollicitation du muscle lésé, avec utilisation d’une attelle ou de cannes si besoin les premiers jours.
- Glace : l’application régulière de glace diminue l’inflammation et la douleur.
- Compression : un bandage compressif au niveau de la zone touchée limite l’apparition d’un hématome.
- Élévation : surélever le membre atteint réduit le gonflement et la tension musculaire.
- Anti-inflammatoires : des médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens sont prescrits pour atténuer la réaction inflammatoire.
- Kinésithérapie : un traitement précoce par physiothérapie aide à résorber l’œdème et assouplir les tissus cicatriciels.
- Chirurgie : en cas de rupture musculaire totale, une intervention chirurgicale de suture est parfois nécessaire.
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Rééducation
La rééducation vise à restaurer force et souplesse du muscle lésé par :
- Exercices spécifiques : des mouvements contrôlés sollicitant le muscle blessé stimulent le développement de nouvelles fibres musculaires.
- Renforcement musculaire progressif : un programme graduel de musculation permet de retrouver la masse et la tonicité musculaire.
- Étirements : des étirements réguliers assouplissent les tissus cicatriciels et restaurent l’amplitude articulaire.
- Travail proprioceptif : des exercices d’équilibre et de coordination renforcent les capacités neuromusculaires et la stabilisation des articulations.
Cette rééducation doit être prolongée sur plusieurs semaines, avec une reprise progressive de l’activité sportive.
Prévention
Adopter les bonnes pratiques suivantes peut aider à prévenir les déchirures musculaires :
- Échauffement : un échauffement complet avant un effort prépare les muscles et les rend plus élastiques.
- Étirements : des étirements réguliers assouplissent les muscles et tendons, augmentant leur résistance.
- Bonne hygiène de vie : une alimentation équilibrée et un sommeil réparateur optimisent la récupération musculaire.
- Adaptation de l’entraînement : la progressivité de la charge d’entraînement et le respect des temps de récupération sont essentiels.
Complications
Une prise en charge inadaptée des déchirures musculaires risque d’entraîner :
- Récidive : une rééducation trop brève ou un retour prématuré au sport favorisent les rechutes de déchirure au même endroit.
- Douleurs chroniques : une cicatrisation fibreuse peut provoquer des douleurs persistantes handicapantes.
- Perte de mobilité articulaire : l’enraidissement des tissus lésés restreint la souplesse et l’amplitude de mouvement de l’articulation.
Ce qu’il faut retenir
Les déchirures musculaires sont des blessures fréquentes chez les sportifs, aux conséquences parfois sévères. Leur prévention repose sur de bonnes pratiques d’entraînement, d’étirements et de récupération.
En cas de survenue, un diagnostic précis du muscle lésé et du degré de gravité est indispensable. Le traitement associe repos, anti-inflammatoires et physiothérapie les premiers jours. Une rééducation prolongée visant un renforcement musculaire progressif est ensuite essentielle avant la reprise du sport.
Le respect des délais de cicatrisation et de réathlétisation réduit les risques de récidive, de douleurs chroniques ou de séquelles articulaires.
Sources éditoriales et fact-checking