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Vous avez probablement entendu parler des nitrates et des nitrites, ces composés azotés présents naturellement dans certains aliments ou ajoutés comme additifs dans d’autres. Mais savez-vous vraiment ce qu’ils sont, d’où ils viennent et quels sont leurs effets sur notre santé ? C’est ce que je vous propose de voir ensemble dans cet article.
Nitrates et nitrites : des cousins chimiques
Commençons par une petite leçon de chimie. Les nitrates (NO3) et les nitrites (NO2) sont des ions composés d’azote et d’oxygène. Ils ne diffèrent que par un atome d’oxygène. Mais ce petit détail fait toute la différence !
Les nitrates sont relativement stables et inertes. On les trouve naturellement dans le sol, l’eau et certains végétaux comme :
- Les légumes-feuilles (épinards, laitue, roquette…) ;
- Les légumes-racines (betteraves, navets, radis…) ;
- Certaines herbes aromatiques (céleri, persil, fenouil…).
En fait, les légumes sont la principale source de nitrates dans notre alimentation, contribuant pour 80 à 95 % des apports. Eh oui, même en mangeant sainement, on n’y échappe pas !
Les nitrites, eux, sont beaucoup plus réactifs. Ils peuvent se former à partir des nitrates grâce à certaines bactéries présentes dans notre bouche et notre tube digestif. Mais ils sont aussi utilisés comme additifs dans les charcuteries et les viandes transformées pour leur donner cette jolie couleur rosée et les protéger des microbes.
Des effets bénéfiques insoupçonnés
Vous vous demandez sûrement : mais alors, ces nitrates et nitrites sont-ils bons ou mauvais ? La réponse n’est pas si simple.
D’un côté, les nitrates apportés par les légumes semblent avoir des effets plutôt positifs sur notre santé :
- Ils peuvent se transformer en oxyde nitrique (NO), une molécule qui dilate les vaisseaux sanguins, fait baisser la pression artérielle et améliore la circulation.
- Ce même oxyde nitrique module l’activité de certaines cellules immunitaires comme les macrophages et les lymphocytes, renforçant nos défenses naturelles contre les virus et les bactéries.
Surprenant, n’est-ce pas ?
Des risques à ne pas négliger
Si les nitrates apportés par l’alimentation, en particulier via les légumes, semblent globalement bénéfiques pour la santé, il n’en va pas de même pour les nitrites qui en dérivent. En effet, dans certaines conditions, ces derniers peuvent engendrer la formation de composés potentiellement délétères pour l’organisme.
La formation de nitrosamines cancérigènes
Lorsque les nitrites entrent en contact avec des amines ou des amides issus de la dégradation des protéines, une réaction chimique peut survenir et donner naissance à des molécules baptisées nitrosamines. Or, il s’avère que bon nombre de ces substances sont dotées de propriétés cancérogènes avérées.
Ce phénomène est particulièrement préoccupant dans les produits de charcuterie et les viandes transformées. En effet, la conjonction de plusieurs facteurs favorise la formation de nitrosamines dans ces aliments :
- La présence simultanée de nitrites ajoutés comme conservateurs, de protéines animales et de fer héminique ;
- Les températures élevées appliquées lors des processus de cuisson, de fumaison ou de salaison ;
- L’acidité du milieu stomacal qui catalyse les réactions de nitrosation lors de la digestion.
Ainsi, la charcuterie constitue un véritable cocktail propice à l’émergence de ces composés indésirables.
Charcuterie et cancer du côlon : une liaison dangereuse
Saucisses, jambons, pâtés… Si ces mets régalent nos papilles, ils pourraient aussi nourrir les cellules cancéreuses tapies dans notre côlon. C’est en tout cas ce que suggère un faisceau d’études épidémiologiques de plus en plus concordantes.
Le constat est sans appel : plus on consomme de charcuteries, plus on augmente son risque de développer un cancer colorectal. Une étude parue en 2015 dans la revue “The Lancet Oncology” a ainsi montré que chaque tranche de 50 grammes de viande transformée ingérée quotidiennement majorait ce risque de 18 %(1).
Faut-il pour autant incriminer les seuls nitrites ? Probablement pas. D’autres caractéristiques de la charcuterie, comme sa richesse en graisses saturées, en sel et en fer héminique, participent sans doute à cet effet délétère. Mais une chose est sûre : la formation de nitrosamines cancérigènes à partir des nitrites est un facteur aggravant.
D’ailleurs, en 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé la viande transformée dans la catégorie des cancérogènes avérés pour l’homme (groupe 1), aux côtés du tabac ou de l’amiante. Une décision lourde de sens, qui a fait l’effet d’une bombe dans l’industrie agroalimentaire.
Alors, faut-il pour autant dire adieu à la charcuterie ? Pas nécessairement. Mais il est clair qu’elle doit rester un aliment plaisir, consommé de façon occasionnelle et avec modération.
Le risque de méthémoglobinémie chez le nourrisson
Outre leur potentiel cancérigène, les nitrites peuvent aussi avoir des effets délétères aigus, en particulier chez les nourrissons de moins de 6 mois. Ils sont en effet susceptibles de provoquer une pathologie rare mais potentiellement grave : la méthémoglobinémie.
Cette affection se caractérise par une augmentation anormale de la méthémoglobine dans le sang. Il s’agit d’une forme altérée d’hémoglobine, incapable de transporter correctement l’oxygène jusqu’aux tissus. Il en résulte une cyanose (coloration bleutée de la peau et des muqueuses) et une asphyxie tissulaire pouvant engager le pronostic vital.
Chez les jeunes enfants, le risque est accru pour plusieurs raisons :
- L’immaturité de leur barrière intestinale et de leur flore digestive, qui favorise le passage des nitrites dans la circulation sanguine ;
- La plus grande sensibilité de leur hémoglobine fœtale à l’oxydation par les nitrites ;
- La moindre efficacité de leurs systèmes enzymatiques chargés de réduire la méthémoglobine.
Ce qu’il faut retenir
D’un côté, ils peuvent avoir des effets bénéfiques via la production d’oxyde nitrique et l’action antimicrobienne. De l’autre, ils peuvent engendrer des composés potentiellement cancérigènes dans certaines conditions.
La clé est donc de trouver le juste équilibre en privilégiant les sources naturelles de nitrates (les légumes) et en limitant les sources de nitrites ajoutés (les charcuteries). Comme souvent en nutrition, la modération et la variété sont les maîtres-mots.
Dernières astuces : varier votre alimentation ! Incluez des aliments riches en vitamine C et en polyphénols, comme les agrumes, le thé ou le cacao. Ils aident à inhiber la formation de composés nitrosés potentiellement cancérigènes.
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Sources éditoriales et fact-checking