Parmi les 20 acides aminés qui composent nos protéines, la glutamine est l’acide aminé le plus abondant dans le corps humain. La glutamine est un substrat majeur utilisé par nos cellules intestinales.
Les rôles de la glutamine dans diverses physiopathologies intestinales sont scientifiquement très bien documentés.
La glutamine est aujourd’hui largement utilisée en complément alimentaire dans divers tableaux pathologiques comme l’intestin irritable, les tableaux inflammatoires, ou les pathologies auto-immunes.
L’intestin, notre organe d’absorption
L’intestin est un organe dont le rôle est d’absorber les nutriments. Lorsque nous mangeons, les aliments du bol alimentaire sont digérés pour obtenir des molécules plus petites : les nutriments. Ces nutriments seront alors absorbés par des cellules qui recouvrent la paroi de notre intestin : les entérocytes.
Ces entérocytes sont donc dédiés à l’absorption. Ils présentent une face qui a l’aspect d’une brosse, flanquée de milliers de microvillosités, qui vont augmenter leur surface d’absorption. Les nutriments sont absorbés par les entérocytes puis passent dans notre circulation.
Pour permettre une absorption efficace, la lumière intestinale des mammifères est tapissée d’une seule couche d’entérocytes. Une unique couche de cellules sépare donc la lumière de l’intestin de l’intérieur de notre corps. Ces entérocytes sont normalement bien accolés l’un à l’autre par des jonctions dites jonctions serrées.

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La qualité structurale des entérocytes et des jonctions serrées constitue notre barrière intestinale, qui protège l’intérieur de notre corps du contenu de la lumière intestinale. Cette couche cellulaire unique d’entérocytes est donc fragile et les entérocytes sont renouvelés tous les quatre à cinq jours. Ce haut niveau de prolifération cellulaire est absolument nécessaire pour maintenir la bonne qualité de notre paroi intestinale.
La porosité intestinale
Cependant, lorsque la muqueuse intestinale est altérée et enflammée, les entérocytes peuvent être dégradés, les jonctions serrées se distendent et cette barrière est endommagée.
On parle alors d’intestin perméable, d’hyperperméabilité intestinale ou d’intestin passoire. Cet endommagement de la muqueuse de l’intestin grêle provoque une fuite de la lumière intestinale vers le flux sanguin.
Des portions d’aliments non digérés comme les peptides de gluten, des bactéries et des déchets toxiques peuvent alors entrer dans notre corps.
Notre système immunitaire répond donc à cette terrible agression et la porosité intestinale est souvent impliquée dans des tableaux inflammatoires et dans les pathologies auto-immunes.
Cette porosité intestinale est provoquée par plusieurs facteurs comme les additifs alimentaires (agents de saveur, colorants, stabilisants), par certains médicaments, par une flore intestinale déréglée (dysbiose), par la présence de protéines non complètement digérées comme les peptides de gluten, ou par le stress qui induit une respiration superficielle et donc un défaut d’oxygénation au niveau de l’abdomen.
Pour lutter contre cette porosité intestinale et l’inflammation qu’elle engendre, il faudra donc diminuer ces facteurs d’agression de notre paroi intestinale.
Il sera également nécessaire d’apporter en quantité suffisante des nutriments nécessaires à la régénération des entérocytes, comme la glutamine. La stratégie thérapeutique sera donc de diminuer les agressions et de soutenir la réparation de la paroi intestinale.
La glutamine, un nutriment clé pour l’intestin
La glutamine est un acide aminé qui est essentiel pour les entérocytes, ces cellules qui tapissent notre intestin, ils en font une grosse consommation, comme le démontrent ces différentes études.
Parmi les différents tissus utilisant la glutamine à des taux élevés, il a été montré que l’intestin utilise environ 30% de la glutamine totale provenant de notre alimentation(1). Des études chez des adultes en bonne santé ont démontré que les trois quarts de la glutamine fournie par voie entérale était absorbée dans le tissu splanchnique, et que la majeure partie de la glutamine absorbée est métabolisée (utilisée) dans l’intestin(2)(3).
Un quart de la glutamine plasmatique est absorbée par l’intestin grêle lors de son passage dans l’organe(4). Il a également été rapporté que l’intestin entrait en compétition avec d’autres tissus pour le pool de glutamine de l’organisme provenant de sources alimentaires(5).
Glutamine : renouvellement cellulaire des entérocytes, et synthèse des jonctions serrées
Le métabolisme de la glutamine dans l’intestin a été intensivement étudié. En physiologie intestinale, la glutamine favorise la prolifération et le renouvellement des entérocytes, elle stimule également la biosynthèse des protéines des jonctions serrées, et elle protège les cellules contre l’apoptose (la mort cellulaire) et contre les stress cellulaires dans des conditions normales et pathologiques(6)(7)(8)(9)(10).
De plus, la glutamine supprime les voies de signalisation pro inflammatoires. L’inflammation est une cause de maladies intestinales, telles que la colite ulcéreuse, la maladie de Crohn, la maladie et le cancer colorectal(11). Le traitement de l’inflammation intestinale est important dans la prise en charge de ces maladies.
Plusieurs résultats scientifiques indiquent que la glutamine a un effet anti-inflammatoire. Cette propriété est due au fait que la glutamine influence un certain nombre de voies de signalisation pro inflammatoire, y compris le facteur nucléaire NF-kB et le transducteur de signal et activateur des voies de transcription (STAT)(12).
Ce facteur de transcription NF-kB, inhibé par la glutamine, est central dans les processus inflammatoires(13). La glutamine est donc un supplément qui va permettre de régénérer et de réparer les entérocytes pour lutter contre la porosité intestinale et de réduire l’inflammation.

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Réserves de glutamines
Les réserves de glutamine sont épuisées lors d’un stress métabolique sévère, notamment lors d’un traumatisme, d’une septicémie et/ou lors d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin. L’efficacité de la supplémentation en glutamine a été testée sur des modèles pathologiques humains et animaux(14)(15).
Dans ces études il a été montré que dans les situations pathologiques, la quantité de glutamine nécessaire pour observer une amélioration des résultats cliniques était assez élevée : 21 g de glutamine/jour pendant 28 jours pour la maladie de Crohn et 42 g/jour pendant 21 jours pour le syndrome de l’intestin court.
Dans un essai contrôlé randomisé, Benjamin et al. rapporté que supplémentation en glutamine à 0,5 g/kg de poids corporel pendant deux 2 mois chez les patients atteints de la maladie de Crohn en phase de rémission avait pu réduire la perméabilité intestinale et rétablir la morphologie(16).
Plus généralement, pour des pathologies moins marquées, des doses de 5 à 10 g par jour sont employées.
Références