La popularité croissante des friteuses à air (airfryers) soulève des questions cruciales sur la santé des consommateurs et leur vie privée. Une double enquête, menée par des chercheurs turcs et l’association britannique Which?, révèle des préoccupations majeures concernant ces appareils de cuisine connectés(1).
Risques sanitaires : l’acrylamide en question
Une découverte préoccupante
Une équipe de recherche de l’université de Gazi à Ankara vient de mettre en lumière un paradoxe inquiétant : alors que les airfryers sont commercialisés comme une alternative plus saine à la friture traditionnelle, ils produisent davantage d’acrylamide, une substance potentiellement cancérogène. Cette révélation ébranle les certitudes des consommateurs qui pensaient avoir trouvé la solution idéale pour concilier plaisir gustatif et alimentation équilibrée. L’acrylamide, longtemps méconnue du grand public, se retrouve ainsi propulsée au cœur des débats sur la sécurité alimentaire.
Des chiffres révélateurs
Les résultats de l’étude comparative sont sans appel. Les mesures effectuées montrent que les airfryers génèrent un taux d’acrylamide de 12,19 μg/kg, soit significativement plus que la friture traditionnelle qui atteint 8,94 μg/kg. La cuisson au four conventionnel présente quant à elle le taux le plus bas avec 7,43 μg/kg. Ces écarts considérables s’expliquent notamment par les températures élevées et la circulation d’air intense caractéristiques des airfryers.
Comprendre l’acrylamide
Formation et présence
L’acrylamide apparaît lors de la réaction de Maillard, un processus chimique complexe qui se déclenche lorsque des aliments riches en glucides et pauvres en protéines sont exposés à des températures élevées. Cette réaction, paradoxalement responsable des saveurs et de la coloration dorée tant appréciées dans la cuisine, produit également cette substance potentiellement nocive. La température de cuisson joue un rôle crucial : plus elle est élevée, plus la formation d’acrylamide est importante.
Aliments concernés
Le phénomène touche particulièrement les produits à base de pommes de terre soumis à une cuisson à haute température. Le café, qu’il soit torréfié ou instantané, n’échappe pas à cette réaction chimique. Les produits de boulangerie comme le pain frais, les biscuits et les pains grillés sont également concernés. La présence d’acrylamide dans ces aliments quotidiens souligne l’importance d’une prise de conscience collective sur nos méthodes de cuisson.
La dimension numérique : une surveillance insidieuse
Des pratiques controversées
L’investigation menée par Which? a mis au jour des pratiques de collecte de données particulièrement invasives. Certains modèles d’airfryers connectés vont bien au-delà de leurs fonctions culinaires déclarées : ils procèdent à des enregistrements audio sans justification apparente, partagent des données personnelles avec des réseaux sociaux comme TikTok, suivent la position géographique des utilisateurs avec une précision troublante, et transmettent ces informations vers des serveurs situés en Chine. Cette collecte excessive de données pose de sérieuses questions éthiques et légales.
Le cas Xiaomi
L’application Xiaomi associée à leurs airfryers illustre parfaitement ces dérives. Une analyse approfondie révèle des connexions multiples avec différents acteurs du numérique. L’application communique simultanément avec Facebook pour le profilage publicitaire, Pangle (le réseau publicitaire de TikTok) pour le ciblage comportemental, et Tencent, le géant technologique chinois, pour des raisons non clairement établies. Cette architecture de surveillance sophistiquée dépasse largement le cadre d’un simple appareil de cuisine.
Solutions et recommandations
Réduction de l’acrylamide
Une méthode simple mais efficace a été identifiée : le trempage préalable des pommes de terre dans l’eau avant la cuisson réduit significativement la formation d’acrylamide, quelle que soit la méthode de cuisson utilisée.
Protection des données
Conseils pratiques pour les utilisateurs :
- Limiter les autorisations accordées aux applications ;
- Vérifier régulièrement les paramètres de confidentialité ;
- Désactiver les fonctionnalités non essentielles ;
- Être vigilant lors de la configuration initiale.
Perspectives et enjeux futurs
L’ICO (Information Commissioner’s Office) prévoit la publication de nouvelles directives au printemps 2025 pour encadrer les fabricants d’appareils connectés. Ces directives devront notamment clarifier :
- L’utilisation des données personnelles ;
- Les obligations de transparence ;
- Les mesures de protection des consommateurs.
Le mot de la fin
Cette double problématique sanitaire et numérique illustre la complexité des enjeux liés aux objets connectés dans notre quotidien. Si les airfryers représentent une innovation culinaire intéressante, leur utilisation soulève des questions qui méritent l’attention des consommateurs et des régulateurs.
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Sources éditoriales et fact-checking